En synthèse :
Les entreprises éligibles peuvent différer le paiement de leurs factures de fourniture d’énergie (électricité, gaz) et d’eau potable, ainsi que des loyers de leurs locaux professionnels ou commerciaux.
Les factures d’énergie ou d’eau impayées seront amorties sur au moins six mois à l’issue de la période d’état d’urgence sanitaire.
Les modalités de remboursement des loyers impayés ne sont pas prévues.
En détail :
Ordonnance 2020-316 du 25/03/2020 relative au paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférents aux locaux professionnels et commerciaux des entreprises dont l'activité est affectée par la propagation de l’épidémie de COVID-19.
Bénéficiaires du dispositif (art.1er) :
- Les personnes physiques et morales de droit privé (entreprises ou associations) exerçant une activité économique qui sont susceptibles de bénéficier du fonds de solidarité prévu à l’ordonnance 2020-317, à savoir celles exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du COVID-19
- Les personnes physiques et morales de droit privé qui poursuivent leur activité dans le cadre d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire (autrement dit, en procédure collective, en « période d’observation » ou « maintien d’activité »)
> Les critères précis d’éligibilité seront fixés dans les prochains jours par un décret qui précisera des seuils d’effectif, de chiffre d’affaires, de perte de chiffre d’affaires constatée du fait de la crise sanitaire. Toutes les entreprises ne seront pas éligibles.
> Pour les entreprises en procédure collective, une attestation de l’un des mandataires de justice désignés est requise.
Fourniture d’énergie (électricité, gaz) et d’eau potable (art. 2 et 3) :
- Les fournisseurs ne peuvent procéder à aucune suspension / interruption / réduction / résiliation jusqu’à la cessation de l’état d’urgence sanitaire pour non-paiement des factures.
> Les autres causes de rupture restent valides, y compris des défauts de paiement antérieurs
> Il semble nécessaire d’avoir une démarche active à l’égard de ses fournisseurs
> Les bénéficiaires doivent produire une attestation d’éligibilité
- Les fournisseurs doivent accepter, sur demande du bénéficiaire, de reporter les échéances de paiement des factures exigibles entre le 12 mars 2020 et la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire et non encore acquittées.
- Les dettes reportées sont réparties de manière égale sur les échéances de paiement des factures postérieures au dernier jour du mois suivant la date de fin de l’état d’urgence sanitaire, sur une durée ne pouvant être inférieure à 6 mois.
> Le report de paiement n’est pas automatique, il doit être demandé
> Il n’est pas rétroactif ; les échéances qui auront été payées, même pendant la période, ne seront pas restituées (attention aux prélèvements bancaires)
> Report sans pénalités / frais / indemnités
> Moratoire de 6 mois minimum, les bénéficiaires peuvent demander un délai plus long (il est recommandé de justifier cette demande, par exemple en présence d’une saisonnalité de l’activité)
> Les bénéficiaires doivent produire une attestation d’éligibilité
Locaux professionnels et commerciaux (art.4) :
- Aucune action (de quelque nature – cf art.4) ne peut être engagée par un bailleur pour défaut de paiement de loyers ou de charges locatives dont l’échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de 2 mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.
> A la différence, notable, des sommes dues en exécution des fournitures d’énergie et d’eau, le sort des loyers impayés n’est pas prévu par l’ordonnance
> On comprend que les bailleurs retrouvent toutes liberté d’action à l’expiration d’un délai de deux mois au terme de l’état d’urgence
> Ces dispositions ne concernent pas les loyers échus antérieurement au 12 mars 2020 ; autrement dit, le loyer trimestriel échu le 1er janvier 2020 au titre du premier trimestre civil resterait dû et, surtout, pourrait justifier une action résolutoire (ou autre)
> Toute liberté contractuelle est laissée aux bailleurs et locataires pour négocier le sort des loyers venant à échéance dans cette période ; il semble utile que les locataires prennent l’initiative de formuler une proposition qui pourrait combiner abandon et moratoire
> En cas de difficultés avec son bailleur, l’entreprise peut demander la désignation d’un mandataire ad hoc ou d’un conciliateur pour se faire assister dans cette négociation ; il ne suffit pas de bénéficier d’un sursis de paiement, il faut impérativement prévoir les modalités d’apurement ultérieur de ces échéances
- L’application des dispositions des articles L.622-14 et L.641-12 du code de commerce est expressément exclue
> Le bailleur ne peut invoquer la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers, même au-delà des trois premiers mois de période d’observation
> Attention, il retrouvera cette faculté faute de paiement (ou d’accord, ou de décision judiciaire) deux mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire
L’ASPAJ met à la disposition de ses adhérents un modèle de courrier au bailleur qui vise à proposer de réduire un loyer mensuel de 100 € à 10 € par mois pendant trois mois, puis de payer 110 € par mois pendant dix-huit mois, le solde étant abandonné. Sur quinze mois, l’entreprise paierait 2010 € (3*10 + 18*110) au lieu de 2100 € (21*100).
Il faut évidemment l’adapter en fonction des capacités de l’entreprise, sans hésiter à augmenter la durée ou le montant des remises.
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